Federer, tout simplement magnifique

On pensait que l’histoire sportive de l’année serait le retour de l’Américain Lance Armstrong sur le Tour de France. Il n’en est rien. L’histoire sportive de l’année, elle s’est jouée en trois actes, en trois sets (6-1 7-6 6-4), sur le central de Roland-Garros, dimanche. L’histoire sportive de l’année, c’est d’avoir vu Roger Federer soulever pour la première fois la magnifique Coupe des Mousquetaires. De l’avoir vu se laisser emporter par l’émotion et verser de chaudes larmes en écoutant l’hymne national de son pays.

Cette Coupe, Federer la connaissait bien. Il avait regardé trois fois Rafael Nadal la tenir à bout de bras et lui mordre l’oreille pour le plus grand bonheur des photographes. Mais, “Rodgeure” n’avait jamais eu le droit de toucher ce trophée. Cette injustice est aujourd’hui réparée. Cette fois, le Bâlois est monté sur le podium, mais en tant que vainqueur et non plus en tant que vaincu. Ses larmes étaient cette fois de joie et non plus de frustration.

“Pour moi, tu es le plus grand joueur de l’Histoire et tu mérites ce titre“. Robin Söderling, avec beaucoup de fair-play, a résumé en une phrase ce que l’ensemble du public du court Philippe Chatrier pensait tout bas.

Oui, Roger Federer est sans doute le plus grand joueur de l’histoire du tennis moderne. Dimanche, il a conquis son 14e titre du Grand Chelem, égalant le record de l’Américain Pete Sampras, qui lui n’a jamais été sacré Porte d’Auteuil. Dimanche, il a rejoint un autre Américain, Andre Agassi, dernier joueur à avoir triomphé dans les quatre épreuves majeures du circuit.

Agassi était là pour fêter le 10e anniversaire de sa victoire aux Internationaux de France et c’est lui qui a remis la Coupe au Suisse, comme une sorte de passation de témoin entre deux exceptionnels joueurs.

Oui, Roger Federer est sans doute le plus grand joueur de l’Histoire parce qu’il a disputé 19 finales du Grand Chelem en l’espace de six années. La statistique est tout bonnement sans égale. D’autant moins, qu’il n’en a pas encore terminé avec le tennis et il sera intéressant de voir ce qu’il fera à Wimbledon, ce carré de gazon qu’il a transformé en jardin en éliminant, un jour, un certain Sampras.

Moment magique

Mais peut-être le plus remarquable, ce qui force le plus le respect est l’abnégation du Suisse. Il n’a jamais renoncé, il n’a jamais bradé son rêve, il a continué d’y croire et de lutter pour le réaliser, même après trois finales perdues à la suite face à Rafael Nadal. La dernière, en 2008, avait été particulièrement humiliante. D’autres auraient jeté l’éponge, mais pas lui. Il est revenu pour tenter une nouvelle fois sa chance contre l’Espagnol qui était donné comme le grandissime favori avant les premiers échanges de balles.

Federer était arrivé à la Porte d’Auteuil en ayant certes remporté le tournoi de Madrid face à Rafa, mais surtout il restait sur deux échecs cuisants, en finale de Wimbledon et en finale de l’Open d’Australie contre l’Espagnol. Pendant tout ce tournoi parisien, il a paru souffrir et il a livré son match le plus réussi de la quinzaine le jour de la finale.

Söderling, qui a réussi un inattendu et superbe parcours à Roland-Garros, a certainement rendu un fier service à Federer en sortant le Majorquin en 8e de finale. “Cela fait du bien d’être une fois sur le podium en tant que vainqueur“, a déclaré Federer s’adressant au public après le match. “C’est un moment magique, et je voudrais remercier les spectateurs qui m’ont toujours soutenu.“

Il n’a jamais fait de doute que les travées du central ont pris fait et cause pour le Suisse dès lors que Nadal fut éliminé. On peut les comprendre, le public avait envie d’assister à un moment historique, à un de ces instants, dont on se rappelle des années plus tard, dont on reparle avec nostalgie. Dans son triomphe, Federer a offert à Söderling un lot de consolation. Le Suédois restera lui aussi dans les mémoires, son nom ne disparaîtra pas comme ceux des Michael Pernfors ou Martin Verkerk. Son nom restera comme celui du joueur qui disputa cette finale historique.